James Paddon L’aventurier devenu pionnier économique
- S.Lecornu
- 22 août
- 3 min de lecture
Pendant des décennies, la Nouvelle-Calédonie a rêvé d’exporter les richesses de sa terre. Avant le nickel, c’est l’agriculture qui nourrissait les ambitions : santal, café, coprah, coton, canne à sucre, élevage, cacaoyer… Une saga d’explorateurs, de commerçants, de colons, de savoir-faire et de désillusions, que nous allons vous raconter au fil des numéros.

L’appel du Pacifique
Nous sommes en 1841. La Nouvelle-Calédonie est encore une terre incertaine, peuplée de clans kanak, visitée par quelques missionnaires et militaires. Mais James Paddon, un Anglais de 30 ans, y entrevoit déjà un potentiel immense.
Né en 1811, il a sillonné les mers du Pacifique, monté un comptoir florissant à Tanna (Vanuatu), et bâti sa fortune sur le commerce du santal, du trocas, des concombres de mer, des peaux et autres ressources naturelles prisées.
Port Resolution, sa base dans les Nouvelles-Hébrides, devient une escale incontournable sur les routes commerciales entre Sydney, Nouméa et les îles du Pacifique. Mais le santal s’épuise, et Paddon vise plus loin.
Premiers pas sur la côte calédonienne
En 1843, il débarque à Maré, mais une attaque lui coûte la vie de 18 hommes. Il ne renonce pas.
En 1846, il installe un campement à l’Île des Pins, puis remonte la côte Est : Hienghène, Balabio, Poum, Balade…
Il y implante des comptoirs pour approvisionner les baleiniers et les santaliers.
L’île Nou, berceau de l’économie coloniale
C’est en 1853 qu’il obtient l’île Dubouzet (future île Nou), cédée par le Grand Chef Kuindo contre des barils de tabac et des étoffes.
Il y installe un four à chaux, un chantier naval, un comptoir de commerce, une base d’élevage... Il importe et introduit sur le territoire les premiers bœufs, chevaux, moutons, porcs.
À cette époque, 200 travailleurs kanak, 80 Européens et des jardiniers chinois vivent sur place. Il emploie des stockmen pour surveiller les troupeaux, construire des stockyards, conduire les bêtes jusqu’à la boucherie. Il pose ainsi les bases de l’élevage calédonien, encore vivant aujourd’hui.
Une activité économique foisonnante
Depuis l’île Nou, Paddon rayonne : il ouvre des comptoirs à La Foa (Urai), Koumac, Houaïlou, Canala. Il commerce avec tout le Pacifique grâce à une vingtaine de bateaux.
Il exporte santal, bêche-de-mer, huile de coco, poisson séché, ailerons et foie de requins, peaux (utilisées comme abrasif), et même du courrier – première liaison postale avec l’Australie !
De l’ombre à la capitale
En 1854, le commandant Tardy de Montravel découvre ses installations et en est impressionné.
Il décide d’installer la capitale de la colonie à Port-de-France (futur Nouméa), sur les structures de Paddon, plutôt qu’à Canala, initialement pressentie.
Mais le vent tourne...
Le repli de l’homme d’affaires
Anglophone, en situation de quasi-monopole, Paddon devient gênant. En 1857, il vend l’île Nou à l’administration française pour 40 000 francs, puis s’installe à Païta en 1858, sur une concession agricole de 4 000 hectares, entre les rivières Kari- Kouyé et Katiramona.
Il y rêve d’une colonie agricole modèle.
Un mausolée pour la mémoire
James Paddon meurt à Sydney en 1861.
En 1866, ses proches rapatrient ses cendres à Gadji (Païta), où un mausolée est érigé en son honneur.
Il est aujourd’hui presque oublié, mais fut bel et bien le premier grand acteur économique de la Nouvelle-Calédonie.
Dans le prochain épisode…
Le bétail : conduites spectaculaires, stockmen, viande locale…Comment une poignée de bêtes est devenue une tradition bien vivante.
Clément Germain





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